« Tout ce qui n'est pas prose est vers et tout ce qui n'est point vers est prose »
Molière, Le bourgeois gentilhomme, acte II, scène IV
Dans la continuité de « Les fantômes du ghetto » et « Quai de l'oubli », la nouvelle prose « Priez Pauvres Pêcheurs » vient non pas pour raconter ce que Vladimir « veut dire » mais ce que ses photos « veulent faire ». Une grosse claque à tout ce qu’on pourrait qualifier comme vie en poésie…
Une continuité, sans doute, parce que Vladimir n’a plus besoin de « parler » pour faire connaître ses œuvres mais de faire connaître son point de vue pour « faire» la réalité. « Priez Pauvres Pêcheurs » laisse un sentiment de « déjà vu » et, en même temps, d’un monde en devenir. Ses photos, en l’occurrence, ne relatent pas une réalité, elles la performent.
Cette force de ses photos de « faire » et de « faire faire » est une création de la réalité dans la réalité qui agit, par la suite, en son propre nom. Elle pose la question de ce qui vient après ce monde ancien des pauvres pêcheurs… Y-a-t-il une autre extension de la réalité performée? Pauvre Pêcheur, es-tu là ?
Ivan Ivanov, journaliste
Chaque jour, ils viennent dès cinq heures du matin de Gruissan, et ceci depuis 300 ans. Ils forment une communauté d'une vingtaine de pêcheurs qui s'auto administre et veille scrupuleusement à l’écosystème de l'étang, sa seule personne. L'étang de l'Ayrolle est situé dans le périmètre du parc régional de la Narbonnaise en Méditerranée entre l'étang de Bages-Sigean et celui de Campignol au sud de la France. Il occupe plus de 1300 hectares et n'est jamais plus profond qu'un mètre cinquante. On y pêche de l'anguille verte, de la daurade et du bar. L’anguille est menacée de disparition à cause de la pêche intensive des civelles, et malgré cela son prix n’a cessé de baisser. Pour préserver sa matière première, cette communauté de pêcheurs s’auto-contrôle : chacun est garant du respect des règles de pêche qui maintiendront l’écosystème. Un conseil de prud’ homme propre à la profession peut retirer le permis de pêche à ceux qui contreviennent aux usages. Ils vendent leur pêche directement aux consommateurs, à des intermédiaires, mais le plus souvent aujourd’hui aussi en Espagne et en Italie. La journée d’un pêcheur commence à 4h30 du matin. Dans la barque, il relève les filets, trie ce qu’il a remonté. La matinée sera consacrée à nettoyer et réparer les filets avant de les rejeter dans l’étang, durant l’après-midi.