« J’aime aller à la rencontre des gens, et à la Samaritaine, il n’y a personne ! », s’amuse  Vladimir Vasilev, le seul des onze photographes à ne pas être entré dans le grand magasin. Il a préféré tourner autour, comme un rôdeur muni de son appareil photo. Il a pris le tempsd’observer le bâtiment, son environnement, ses riverains, les voisins, les passants. Il y a certes un caractère documentaire dans son travail, mais il y a surtout quelque chose du roman et du film noirs. Vladimir Vasilev oscille avec brio entre réalité et fiction, et s’amuse à semer le trouble. « C’est un petit jeu avec le spectateur, j’aime laisser planer cette ambiguïté, je ne donne pas la réponse. A chacun de deviner ce qui est réel et ce que j’ai mis en scène… ». La série est une succession de saynètes plus vraies que nature. Pourtant, l’artiste a parfois fait appel à des gens qu’il a rencontrés dans la rue et à qui il a demandé de jouer un rôle. D’une image à l’autre, Vladimir Vasilev montre une bagarre, un baiser volé, un groupe de jeunes qui partent en soirée, un clochard qui dort devant le rideau de fer baissé du grand magasin, un policer qui court…Une vraie série noire, mais qui n’est pas dépourvue d’humour. Comme dans cette image où le cadrage serré isole quatre lettres de l’enseigne de la Samaritaine, « RITA », au milieu desquelles figurent un autocollant « Love me ». Un clin d’œil insolite à la sainte patronne des causes désespérées, comme si celle-ci veillait sur tous les personnages de ces petites histoires.

Connaissance des Arts, novembre 2013
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